Dédiée à l’export de produits bio, la société Obipro créée par Laurence Barthelet propose depuis 2005 des herbes aromatiques et des épices bio sous la marque Sitael, et la gamme n’a cessée de s’enrichir. Depuis 2020, Laurence et ses collaborateurs se sont lancé un nouveau défi : développer leur propre production sur un terrain de 4 hectares tout à-côté de leurs locaux.
ARH-IFH : Bonjour Laurence, quel est votre cheminement professionnel ?
Laurence Barthelet : J’étais pendant 10 ans dans la finance. J’ai travaillé dans des entreprises multinationales, soit à Paris, soit en Bourgogne, et quand pendant 10 ans on a travaillé à faire des budgets, ou des choses de ce type, on se rend compte qu’on n’y voit plus forcément le même sens que celui qu’on y voyait en début de carrière, et on se dit que ce serait bien de trouver quelque chose de plus épanouissant ! C’est là où j’ai décidé de me diriger vers une formation sur les plantes, car ayant toujours été intéressé par les plantes et leurs propriétés, je m’étais dit que cela pourrait être une piste pour une réorientation ou pour simplement apprendre afin de se donner l’envie de continuer.
Voilà, c’est cela qui m’a mené aux plantes.
Y avait-il dans votre famille des gens qui déjà s’intéressaient aux plantes ?
J’ai effectivement plutôt grandi dans un milieu agricole, mon père était agriculteur lui-même, exploitant éleveur laitier, et mes 2 grands-pères aussi étaient agriculteurs. Le fait de vivre sur les fermes a créé déjà un premier lien avec les plantes.
Le format de la formation ARH-IFH m’a séduit : cela me permettait de travailler en cours du soir, à distance.
Vous avez donc décidé de vous réorienter vers une activité en lien avec les plantes : mais pourquoi avoir choisi la formation ARH-IFH plutôt qu’une autre ?
Le format m’a séduit : cela me permettait de travailler en cours du soir, à distance. Donc c’était quand même pas mal du tout. Tout en sachant que j’étais encore salarié mais en ayant déjà décidé de mon nouveau projet professionnel. Donc je trouvais ça très bien. Ce qui m’a plu aussi, c’était la démarche de la structure ARH-IFH, qui s’inscrit dans une transmission de savoirs autour des plantes, et toute la dynamique qu’il y avait me convenait. Je trouvais l’approche plus intéressante par exemple que celle de l’école de Paris qui était peut-être dans une démarche plus universitaire. La formation ARH-IFH était clairement plus compatible avec mon activité.L
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Est-ce que cette formation à l’ARH-IFH vous a permis de concrétiser votre projet et de vous diriger professionnellement vers ce que vous vouliez faire ?
Cela m’a donné des bases de connaissances : on ne nous apprend pas tout bien sûr, mais cela donne envie de continuer. Je pensais au départ que tout de suite après la formation je trouverais ce que je voulais faire avec les plantes, mais je me suis rendu compte assez rapidement qu’une réflexion s’imposait. « C’est vraiment intéressant, mais dans quel secteur dois-je creuser, où dois-je porter mon attention ? » Parce qu’en fait avec les plantes le champ est très vaste, tout est possible : le conseil, la transformation, l’alimentaire, la cosmétique… On peut aussi être producteur et revendre simplement ses plantes sans les transformer. Tous les schémas étaient possibles. Cela m’a pris encore 2 ou 3 ans avant de venir petit à petit vers l’activité que j’ai aujourd’hui.
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Avez-vous gardé des liens avec les gens qui étaient avec vous dans la formation ?
Oui, de temps en temps, on s’échange des messages. On voit les activités de chacun sur les réseaux sociaux, ce qui nous permet d’échanger. On sait qu’il y aura toujours du plaisir à se revoir.
Votre projet de production et vente de cosmétiques était-il votre premier projet , celui que vous aviez en tête dès le départ ?
Non pas du tout ! Parmi tout ce qu’il y avait à faire avec les plantes, ce qui m’a attiré avec les cosmétiques c’était un peu l’aspect chimique, le mélange des matières et tout le travail sur les textures, sur les parfums. Je trouvais qu’il y avait un côté un peu magique. Oui, c’est clairement ça qui m’a le plus attiré.
Et avec le recul, comment s’est passée cette création d’activité ?
C’était assez long. Surtout le développement. En débutant on part avec plein de bonnes intentions, on se dit que ça va très vite démarrer parce qu’on est sur une démarche de qualité, que sur le papier ce qu’on propose, ce n’est pas hyper répandu. Mais mine de rien, tout le travail sur la communication, la partie vente aussi, et tout ce qui est autour de la réglementation des plantes et aussi le côté administratif, ce sont des choses qui prennent du temps, et auxquelles je ne m’attendais pas quand j’ai démarré.
Le fait d’avoir fait des études en gestion et en administration des entreprises m’a évidemment bien aidé à avoir les bons réflexes de gestion.
Qu’est-ce qui vous a aidé à surmonter toutes ces formalités ?
D’aller taper aux différentes portes : la Chambre des Métiers, trouver les bonnes informations sur la réglementation des cosmétiques, aller voir des associations de jeunes entrepreneurs… Le fait d’avoir fait des études en gestion et en administration des entreprises m’a évidemment bien aidé à avoir les bons réflexes de gestion, sur toute cette partie-là je n’avais pas toute la formation à faire.
Comment est perçue votre activité par votre entourage proche ?
Je pense qu’ils ont bien rigolé, et maintenant ils se disent « Ah, en fait il continue quand même, il s’accroche ! »
Pouvez-vous nous présenter vos produits, votre démarche ? J’ai vu sur votre site internet que vous proposiez des crèmes, des baumes, des savons.
Ma démarche est vraiment axée sur la plante : tout démarre de la plante comme je l’ai appris grâce à ma formation en herboristerie. La première étape est de trouver une plante locale pour ses propriétés, et après d’essayer au maximum de garder ses propriétés dans le processus de fabrication, de transformation, afin de créer des produits cosmétiques de qualité. Au plus, voir ce qui pousse déjà localement, c’est pour ça que je travaille avec des orties, des pâquerettes, des pissenlits, des choses qui spontanément se trouvent localement. Et le moins possible aller chercher des plantes au bout du monde, ce que demandent un peu les grandes marques de cosmétiques.
Ce sont des producteurs de plantes qui vous fournissent ?
Alors, au début j’ai essayé par ce biais-là, mais c’était assez difficile de se fournir, c’était peut-être un problème de quantités, alors de plus en plus j’essaie maintenant de faire pousser des plantes dans mon jardin, j’ai du calendula, des camomilles. J’ai aussi un ami maraîcher, donc en ce moment je suis en train de faire des essais de distillations, je me suis acheté un alambic récemment. Cet ami a des plantes qu’il doit tailler de temps en temps, donc quand il y a besoin je vais récupérer du romarin, des choses comme ça, en quantités pour faire des distillations, et finalement je me fournis très peu chez d’autres producteurs de plantes.
Avez-vous un laboratoire ?
Oui, tout à fait, à Montacher-Villegardin. C’était un ancien laboratoire alimentaire, donc partiellement équipé, et c’est vrai que ça m’a fait gagner beaucoup de temps : il est tout carrelé, avec des plans inox… Bien sûr j’ai quand même dû acheter des machines, mais pour le démarrage, c’était quand même assez bien.
Comment se passe la vente sur votre boutique en ligne ?
Je vois ma boutique en ligne comme un assistant commercial, dans le sens où cela permet à des gens qui souhaitent commander une nouvelle fois un produit de facilement pouvoir le retrouver, saisir, payer. Cela me génère automatiquement un bon d’expédition, donc ça me fait gagner du temps, mais pour l’instant je n’ai pas réussi à pousser plus que ça. Spontanément j’ai des nouveaux clients qui achètent directement en ligne : plutôt des gens que j’ai rencontrés sur des marchés, et qui vont se dire que, n’ayant pas de boutique physique, cela va être plus facile pour eux de passer par ma boutique en ligne.
Finalement il y a donc toujours eu un lien entre la formation et mes fournisseurs de plantes.
Par rapport à votre présence en ligne et sur les réseaux sociaux, vous avez gagné le prix « Foliweb Awards Grand Est » en 2021, (voir en bas de page) comment vous organisez-vous pour gérer votre présence en ligne ?
Cela prend du temps… Le plus efficace est de se tenir à un calendrier éditorial, de se dire régulièrement « Sur tel sujet je publie », et de bien tenir cette régularité. Pour moi, les réseaux sociaux sont un moyen de garder le contact avec des clients que j’ai croisés sur des marchés ou ailleurs, « pour éviter qu’ils m’oublient », pour garder le lien et susciter l’intérêt pour des nouvelles choses que je suis en train de préparer. Je mets en ligne des photos quand on fait des cueillettes, ce genre de choses, afin que les gens voient également l’envers du décor. Dans l’artisanat on est un peu sur tous les fronts, et avec les publications sur Instagram ou Facebook ils peuvent mieux comprendre la démarche que l’on met en avant.
Selon vous, est-il possible de créer son activité en lien avec les plantes ?
Si on est passionné par les plantes, il faut y aller, il ne faut pas se poser de questions. Forcément il y aura des moments où c’est moins facile, des moments où l’on se demande si ça va marcher ou pas, mais après, si on sait pourquoi on est là, et que l’on est dans une démarche de qualité, que l’on aime ce qu’on fait, il n’y a pas de raisons… Il ne faut pas y aller en se disant « C’est un secteur qui ramène beaucoup d’argent sans trop travailler… »
Pensez-vous que l’époque a changé, qu’il y a un regain d’intérêt pour les plantes, pour les produits naturels, locaux ?
C’est vrai qu’on entend ce discours, mais selon moi ce sont surtout les actes qui comptent. Oui, les gens en parlent, mais ils ne le font pas tous. Beaucoup disent « Moi je suis pour acheter local » mais quand je mets les gens face à leur réalité en leur demandant « D’accord, mais concrètement, allez-vous acheter chez des producteurs locaux ? » Et bien dans le lot, surtout si après on nous parle d’inflation ou d’autres difficultés liées à la crise, eh bien j’ai l’impression qu’une grande partie des gens reviennent quand même vers les grandes surfaces, les magasins discount, ces machins qui auront des politiques commerciales avec des promotions, et qui attirent beaucoup de monde.
Merci beaucoup Laurence.